L’être humain se pose des tonnes de questions. Curieux de nature et inconfortable face à ses contradictions, il lui arrive de s’interroger existentiellement sur son absence de motivation, l’amenant ainsi à se demander pourquoi il ne fait pas ce qu’il devrait faire.
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Dans toutes les équations entre actions et résultats, la notion d’obligation est rarement une variable à laquelle on souhaite faire face. Préférant de loin se sentir en contrôle, le réflexe optimal devrait être celui de veiller à s’accomplir pleinement sans ne dépendre de quoi que ce soit. En d’autres mots, passer à l’action pour le simple fait de passer à l’action. Et pourtant, nous naviguons à travers les délais, les échéanciers ainsi que tout ce qui nous est imposé, et ce, sans trop de résistance. C’est curieux.
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Se connaitre
Nous adhérons tous à des valeurs à un certain degré. L’importance que nous leur accordons varie en fonction de nos états d’âme, des embuches auxquelles nous sommes confrontés ou de nos préférences générales. Si respecter l’emploi du temps qui vous est attitré est fondamentalement important pour vous, très peu d’éléments viendront susciter l’idée d’y déroger. Qu’il s’agisse d’une tâche fastidieuse ou de votre corvée favorite, c’est le résultat qui importe, soit celui de coller à l’image que vous vous êtes attribuée. Cependant, au-delà de celle-ci, il va de soi de questionner les raisons qui nous poussent à vouloir y correspondre, non?
Si le levier principal est financier (commission, bonus), dès que la récompense attendue disparait, le comportement souhaité devrait en faire autant. Si la raison est affective (attiser le regard de votre patronne), l’absence éventuelle de résultats pourrait à la longue avoir un effet d’usure sur votre intérêt à maintenir de telles habitudes. Or, si cela fait partie de votre ambition d’accomplissement personnel et que vous y voyez un juste milieu entre rigueur, intégrité, efficacité et organisation, vous touchez le gros lot. Certaines personnes carburent à la pression, d’autres y voient une source d’anxiété amputant. L’idée, c’est de se connaitre. Lorsque vos choix vont à l’encontre de ce qui est important pour vous, un conflit interne s’installe et génère un malaise, grand créateur de réflexions, et de nouveaux buts.
Soyez SMART
Un objectif Réaliste, Atteignable (ou Ambitieux), Mesurable et Spécifique. Voilà une recette gagnante où il ne manque que l’assaisonnement : le Temps. La pertinence des dates limites se trouve dans la cohérence que l’on développe afin de les respecter. Toujours est-il que cette tension doit nourrir notre appétit plutôt que de la rendre insupportable. Il faut donc se donner les minutes, les heures et les jours nécessaires pour atteindre ce à quoi on aspire si l’on ne veut pas que nos projets meurent avec les résultats qu’on espérait. Sachant cela, malgré toutes nos bonnes intentions, qu’est-ce qui fait en sorte que certains d’entre nous sommes encore confrontés à des échecs continuels?
Je suis capable
Quelle que soit votre définition de capacité, elle fait surtout référence au sentiment d’être apte à accomplir une action ou un changement. Qui affronterait avec confiance une situation inconnue et nouvelle? Peu de gens. Ainsi, on peut tout autant y voir du désespoir, là où pourtant, l’optimisme est indispensable. Voilà pourquoi le réalisme est si crucial dans cette formule. L’action que vous vous apprêtez à poser est beaucoup plus susceptible de se matérialiser si elle fait du sens pour vous et que vous la croyez possible. Ça prend parfois du courage, d’autres fois des ressources monétaires ou bien par moment, de l’aide.
Le soutien
Se faire à l’idée qu’on ne dispose pas des outils nécessaires pour qu’un changement s’opère prend beaucoup d’humilité. Il faut bien admettre que parfois, il importe d’être confronté à son ambivalence et son impuissance pour qu’une prise de conscience émerge. C’est donc à travers l’accompagnement que quelques-uns identifieront la portée de leur inconfort. Après tout, le développement personnel est à la mode et les ressources se font de plus en plus nombreuses. On ne peut pas toujours y arriver seul et c’est correct ainsi. Quel genre de constats émanent de ceux qui vont chercher de l’aide?
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La motivation est un étonnant mélange entre savoir-faire, entretenir un désir, ressentir des besoins, y voir des bénéfices et le deuil de ce que le statuquo implique.
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Le fameux « oui, mais »
Se convaincre des bienfaits en dépit de tous les désavantages est un art que maitrise tous les individus. Rationnaliser, soit le fait de donner un certain sens à nos actions en se basant sur la raison constitue un obstacle de taille dans notre façon d’approcher la remise en question. C’est un terrain qui doit être exploré continuellement et qui nous amène à se positionner sur un continuum, là où des stades de changement à l’opposé s’alignent.
Pré-contemplation
« Je ne pense pas avoir de problèmes. Je n’envisage pas de changer de comportement. Je ressens essentiellement les bénéfices » CONFORT
Contemplation
« Oui, j’envisage un changement de comportement, mais j’hésite à renoncer aux bénéfices de la situation actuelle. » INCONFORT
Préparation/détermination
« Je me sens prêt à démarrer la phase d’action bientôt. Je prends des décisions et commence à les mettre en place. »
Action
« Le changement est engagé ; je change mon style de vie » ; « Le soutien est nécessaire, car les difficultés sont importantes »
Maintien
« Je dois rester prudent, les tentations peuvent être présentes »
Rechute
Phase parfois nécessaire. Devrait être vu comme un écart pour éviter que les acquis soient négligés.
Sortie permanente
Le stade de maintien est consolidé. La vigilance est de mise, mais le changement est ancré.
Se situer par rapport à ces phases n’est jamais réellement définitif. Les motifs qui nous motivent à agir d’une façon x ou y (ou à arrêter de) peuvent varier, disparaitre ou bien s’accumuler. Le plaisir peut se trouver autant dans le changement que dans le maintien. Tel que mentionné plus haut, il y a évidemment la nature des moteurs d’évolution, mais cette ambivalence nait là où la réticence et la volonté se rejoignent.
· Le rythme est-il soutenu ou trop rapide? Ai-je besoin d’agir maintenant ou cela peut attendre? (pression..)
· Cette tâche m’est-elle imposée? Suis-je le seul à m’y opposer? (liberté..)
· Le doute est-il présent? Vais-je y arriver? Vais-je échouer? Mes actions seront-elles efficaces? (estime..)
· Est-ce désagréable? (aversion)
Contre
· Il y a urgence d’agir. J’ai envie et besoin de faire ces choix. (pression saine)
· Je ne dépends de personne pour agir. Il s’agit de ma propre initiative. (autonomie)
· Je crois en ma capacité d’atteindre mon but ou d’effectuer cette tâche. (estime de soi)
· C’est difficile, mais combien satisfaisant. (persévérance)
Une distinction relativement claire pour un contexte si ambigu. Rarement un processus aussi confrontant s’actualise d’une façon si optimale. Il s’agit fréquemment d’un mélange souffrant d’incompréhension, de culpabilité et d’opposition. S’y positionner est un exercice d’introspection ardu, mais combien enrichissant. Suffit d’explorer cette incertitude, ces « pour » et ces « contres », de comparer avec ce qui compte pour nous.
Se poser les bonnes questions
Qu’est-ce qui me mobilise dans la vie? Qu’est-ce qui compte le plus pour moi?
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Les gens ont besoin de se sentir cohérent avec leurs valeurs clés. Passer à l’action implique logiquement de reconnaitre que nos gestes auront un impact moindrement bénéfique sur notre vie. Si cela était toujours vrai, personne n’adopterait de comportements nocifs comme la dépendance aux substances psychoactives. Reste qu’il peut tout autant s’agir de la meilleure des méthodes identifiées pour se faire du bien.. à un moment donné.
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Êtes-vous en mesure de répondre spontanément aux questions ci-hautes? Difficile, non? Si j’insistais précédemment sur la pertinence de se connaitre, c’est que cela implique de se poser les bonnes questions, et d’y fournir des réponses! C’est seulement après tous ces éclaircissements que vous pourrez identifier vos besoins et par le fait même, ce qui vous permet d’accomplir des choses et d’aller de l’avant. Se sentir utile, accompli tout comme avoir l’impression de se dépasser sont des sources de motivation très tenaces. Sauver de l’argent et perdre du poids aussi. Quoiqu’il y en ait des plus efficaces que d’autres…Parlons-en.
Pourquoi vas-tu au gymnase?
· Je ne le sais pas. Ce n’est pas clair pour moi ce que je vais faire là-bas
· Pour être plus « découpé » quand je vais à la plage et ainsi attirer les regards
· Parce que toutes mes amies y vont*
· Parce que je dois perdre du poids*
· Parce que je veux me prouver à moi-même que je suis une personne active
· Parce que c’est la voie logique pour quelqu’un qui aspire à être en forme
· Parce que m’entrainer m’aide à mieux comprendre comment mon corps réagit
· Parce que m’entrainer me permet de me sentir vivant et mieux dans ma peau*
· Pour le plaisir que je ressens lorsque je me dépasse et atteins mon objectif*
Excepté la première, toutes ces réponses peuvent contribuer à faire en sorte qu’une personne maintienne ou pas ses bonnes (ou mauvaises) habitudes. Néanmoins, objectivement parlant, certaines sont plus significatives, moins superficielles.
· *Si mes amis cessent d’y aller, mettrai-je fin à mon abonnement?
· *Si j’atteins mon poids santé, mettrai-je fin à mon abonnement?
Contre
· Je me dépasse à chaque entrainement et me fixe toujours des objectifs différents. Je cultive ma motivation;
· Être bien dans ma peau est un état que j’apprécie et j’ai trouvé la meilleure façon de l’être.
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Conclusion
Les troubles de la motivation sont humains et varient au gré des périodes de nos vies tantôt teintées de découragement et demain, remplies d’euphorie. À la fin, si la formule idéale n’existe pas, certaines composantes demeurent franchement préférables. Pour se tirer d’affaire, vaut mieux d’abord prendre le temps de réaliser d’où nous partons, avant de savoir où nous allons. Tant qu’à y être, pourquoi pas en chemin acquérir le savoir nécessaire et s’entourer de ceux qui nous éclairent quand la lumière se fait plus discrète. Alors, pourquoi faites-vous ce que vous faites?
- Sébastien Latendresse
Criminologue de Formation, certifié en prévention et réadaptation des toxicomanies. Coordonnateur et intervenant à l'Unité Domremy Ste-Thérèse
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